Mission laïque française

Des petits artistes de la mémoire à Marrakech transmettent la mémoire d’un tirailleur marocain, gardien de son frère français

En l'absence de témoins vivants de la Première Guerre Mondiale, le concours des "Petits artistes de la mémoire" est un moyen privilégié pour combler cette disparition.

Genèse de l'action

Alors qu’avec mes élèves nous parlions de la commémoration de l’armistice, certains n’arrivaient pas à comprendre l’importance du devoir de mémoire, (à l’heure des jeux vidéos dans lesquels « mourir » ne signifie pas grand-chose puisque l’on dispose de plusieurs vies) : « Ces soldats sont morts, n’en parlons plus/ Ils ont voulu se battre, qu’ils assument ! », m’ont-ils dit.
Leur faire découvrir la douleur de ces gens, s’émouvoir de la situation de ces familles décimées, se mettre à la place d’un Poilu pour transmettre sa mémoire, voilà comment donner du sens à la commémoration ! Certains des élèves ne se doutaient même pas que leurs aïeux avaient pu participer à cette guerre.

Objectifs poursuivis

Ce projet transdisciplinaire nous donne une formidable opportunité de lire, dire et écrire dans tous les domaines scolaires. En voici les différents objectifs :

Français :
– connaître des œuvres adaptés à l’âge des élèves selon un thème : la guerre, via un rallye lecture.
– participer à un débat sur une œuvre en confrontant son point de vue à d’autres de manière argumentée.
– lecture intégrale de Zappe la guerre de Zep (Editions Rue du Monde) et de Lulu et la Grande guerre de Fabian Grégoire (Ecole des Loisirs).

Lecture :
– lire et comprendre des textes documentaires en croisant les connaissances acquises et en exerçant son esprit critique. Etude d’un corpus de lettres de Poilus.
– repérer les effets de choix formels (utilisation d’un niveau de langue bien caractérisé de l’époque).
– lire silencieusement un texte littéraire ou documentaire et le comprendre (reformuler, résumer, répondre à des questions sur ce texte).

Etude de la langue :
– vocabulaire : apprentissage de proverbes étrangers, élaboration des champs lexicaux de la guerre (émotions), travail sur les variations d’intensité des adjectifs, les expressions imagées, le sens propre et figuré, les comparatifs et superlatifs, etc.
– grammaire : études des temps de conjugaison, ponctuation, etc.
– orthographe : l’infinitif et le participe passé, l’accord sujet-verbe, les homophones grammaticaux.

Rédaction :
– rédiger différents types de textes d’au moins deux paragraphes en veillant à leur cohérence, en évitant les répétitions, et en respectant les contraintes syntaxiques et orthographiques ainsi que la ponctuation.
– créer un calligramme à la manière d’Apollinaire et des poèmes dont un à la manière de J. Tardieu.
– passer d’un récit à l’écriture d’une bande dessinée.

Expression orale :
– débattre, exposer un sujet à la classe sans lire ses notes, en français et en arabe.
– réciter des poèmes (le dormeur du Val d’Arthur Rimbaud, Au conditionnel de J. Tardieu).

Histoire :
– conditions de vie des soldats, la vie à l’arrière en France et en Allemagne, bilan et pertes.
– dates, batailles et personnages importants de cette guerre : la bataille de Verdun, Clémenceau, Lyautey…
– les sources du conflit, la Première Guerre Mondiale, le traité de Versailles.
– analyse de documents

Géographie :
– acquisition de repères temporels et spatiaux (déroulements des événements, pays engagés dans le conflit, zones et villes des batailles du combattant)
– lecture de cartes et paysages (avant et après la guerre)

Histoire des arts :
– arts de l’espace : l’Arc de Triomphe, la tombe du soldat inconnu, le monument aux morts de Marrakech.
– arts du quotidien : artisanat des tranchées.
– arts visuels : les affiches de propagande, visionnage du film Cheval de Guerre de S. Spielberg.
– arts du son : apprentissage de chants : Sawah d’A. Hafez, Mamy blue de Nicoletta, Parlez-moi de lui de Nicole Croisille, Man in the mirror de M. Jackson

Pratiques artistiques :
– reconnaître, décrire et étudier des œuvres visuelles (l’heureux donateur de R. Magritte est devenu l’heureux tirailleur marocain)
– pratiquer le dessin et diverses formes d’expression visuelles et plastiques en se servant de différents matériaux (khôl et colle, craie grasse et encre, peinture gouache, vernis colle, feutres et crayons de couleurs, encre et gros sel, aquarelle…), supports, instruments et techniques (vieillir une feuille au café, collage, initiation au scrapbooking, peinture à la cuillère, transfert de photo …).

TUIC :
Les élèves ont recherché sur internet des informations sur les combattants de la Première Guerre Mondiale sur le site du Ministère de la Défense : le déroulement des campagnes auxquelles il a participé grâce aux journées des marches et des opérations (JMO), les élèves ont appris à s’informer, exploiter des données, adopter une attitude responsable.
Pour cela, ils ont dû :
– trouver des indices validant les informations et propositions fournies par internet.
– repérer des informations affichées à l’écran.
– saisir une adresse internet et naviguer sur un site.
– saisir un mot clé pour faire une recherche.

EMC :
– identification des valeurs et des symboles de la République.
– notion de droits et de devoirs (Savoir ce qu’est le devoir de mémoire), de justice, de tolérance, de sacrifice.

Déroulement de l'action

Nous sommes partis du vécu des élèves, mais aucun de leurs aïeux n’était « mort pour la France » durant la Grande Guerre.
Nous avons étudié le monument aux morts présent dans le carré militaire de Marrakech mais aucun nom n’y est inscrit. C’est l’ONACVG (L’Office national des anciens combattants et victimes de guerre) qui nous a généreusement fourni des documents sur la vie d’un combattant.
Le travail d’écriture et d’art plastique a duré de novembre à avril, soit 6 mois.

Conditions de réussite de l'action

Les élèves ont véritablement été acteurs de leurs apprentissages. Ils ont cherché les informations par eux-mêmes sur la vie des combattants durant cette guerre, sont allés chercher sur le site du Ministère de la Défense des données et ont produit des écrits motivés.

Ce projet a abouti à un spectacle théâtral.

Apports de l'action pour les élèves

Les élèves se sont tous engagés dans ce projet collectif, ce qui leur a permis d’avoir un autre regard sur le passé et donc de mieux comprendre le présent. L’action des tirailleurs marocains est ainsi mieux appréhendée.
Ils ont pu également exprimer leurs émotions et développer leur culture générale, de même que leur esprit critique ainsi que leur curiosité. Ce travail donne du sens aux apprentissages et redonne confiance aux élèves en difficulté.

Apports de l'action pour l'équipe éducative

Un travail conjoint avec les élèves de 3e dont le programme d’études comprend la Première guerre mondiale peut s’avérer très bénéfique. Cela prend la forme d’exposés, de saynètes et d’atelier d’écriture dont les collégiens sont tuteurs.
Un travail en atelier mené également avec l’enseignant d’arabe permet de travailler le langage oral (présentation d’exposés) et en développant le vocabulaire des élèves.

Liens utiles

[embedyt] https://www.youtube.com/watch?v=j7M27qUUumY[/embedyt]

Remarques

Tous les élèves ont reçu une récompense pour ce travail par l’intermédiaire de M. Dupuis, directeur de l’ONAC-VG, qui s’était déplacé de Casablanca spécialement pour nous féliciter